La Solomon Mahlangu House: affirmation de soi et humanisation à travers la revendication de l’espace noir

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Pandeani Liphosa
Nolan O. Dennis

Résumé

Dans le contexte sud-africain, les mouvements sociaux et les manifestations font l’objet de tant d’attention que ce sont là des sujets considérés comme épuisés. Dans l’Afrique du Sud post-apartheid, ces mouvements demandaient traditionnellement que l’État œuvre pour une amélioration des conditions de vie et des droits civiques de tous les citoyens. Les débats sur le changement sociospatial émancipatoire ne peuvent cependant manquer de mentionner le récent mouvement #FeesMustFall [litt. « #ÀBasLeMinerval », ndlr] sur lequel s’attarde cet article. Décrit comme un nouveau modèle de manifestation des étudiants universitaires, ce mouvement appartient au champ plus large des mouvements MustFall qui ont servi à pointer les réflecteurs sur les tensions existant au sein des institutions sociales et des établissements scolaires d’Afrique du Sud. La longue histoire d’exclusion des Noirs des espaces sociaux, professionnels et académiques sud-africains s’est exprimée dans ce qui a été nommé le mouvement #FeesMustFall.


En plus d’offrir une lecture détaillée et une analyse des racines intellectuelles de ce mouvement, l’emphase spécifique est ici placée sur l’appropriation de la Senate House, le principal bâtiment administratif de l’Université du Witwatersrand, qui fut rebaptisé en Solomon Mahlangu House [en souvenir d’un étudiant et activiste anti-apartheid exécuté en 1979, ndlr]. La discussion de ce cas se concentre sur la manifestation estudiantine qui a déferlé sur tout le pays en 2015. L’approche se fonde sur l’analyse de l’architecture coloniale et de son influence sur les structures spatiales des universités.


La double capacité des configurations architecturales d’intégrer et ségréguer à la fois est rigoureusement exposée en questionnant l’architecture et la manière dont elle a été utilisée comme un des nombreux dispositifs d’exclusion et de perpétuation des inégalités durant l’apartheid.


À l’apogée des manifestations, l’ambition fondamentale du mouvement était de démontrer stratégiquement que la question des minervals et des changements de cursus s’inscrivait dans les objectifs de la décolonisation, comme l’exprimaient l’occupation et la réattribution des toponymes d’espaces universitaires de premier plan. Plus particulièrement, le processus de réattribution d’espaces représente une revendication de propriété, ce qui distingue ce cycle de manifestations de ses précédents historiques durant lesquels la violence était mobilisée pour susciter l’affirmation d’une forme plus désirable d’ordre social. L’article conclut en affirmant que la redéfinition du programme fonctionnel de la Solomon Mahlangu House l’a instituée en espace central de solidarité. Il démontre que la Senate House n’offre pas de potentiel distinct pour résister aux menaces actuelles à son identité transformée. Bien que ce développement ne soit pas la panacée de tous les combats d’aujourd’hui, il s’agit d’un pas vers un espace social et éducatif décolonisé. Ce cas doit être considéré moins comme une solution définitive aux problèmes actuels que comme une ouverture vers une Université du Witwatersrand décolonisée.

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Pandeani Liphosa, University of the Witswatersrand

Pandeani Liphosa is born in Polokwane, Limpopo, South Africa and currently lives and studies architecture in Johannesburg at the University of Witwatersrand.

Having worked and studied within the built environment for just over 10 years Pandeani has developed a particular interest in how it has played a role in the urbanisation of the African continent. Based on a prominently architectural perspective, buildings are explored as more than just passive surfaces that contextualize the expression of power. Pandeani’s work is based on analysing how the city stimulates a force capable of shaping the social world. The way buildings, sidewalks, driveways and highways play an integral part in actively ordering and organising processes that transform the use of the cityscape and shape the subjective identities of urban residents is engaged with through photography, writing and film.

Nolan O. Dennis, independent scholar and artist

Nolan Oswald Dennis is a (South) African artist and insurgent architectural researcher based in Johannesburg. He studied architecture at the University of Witwatersrand and social sciences at the University of Cape Town. His work explores the interface between hegemonic and emergent spatial-information systems. Using techniques of counter-mapping and re-inscribing, his work aims to locate sites of radical African mirroring, decolonizing reflection, and double, triple and infinite consciousness – techniques to refuse, resist, return or reject the neocolonial gaze. His work focuses on the social threshold between fiction and fact, aiming at corrupting the Western hegemonic monopolization of truth, knowledge and power. His work reasserts an epistemic “we” to neoliberal questions of “I” - the “we” that begins in Africa. His work has been displayed in group exhibitions in Africa and Europe.